Article écrit par Zaher Baher (Haringey Solidarity Group et Forum Anarchist Kurde). Traduit de l’anglais (http://anarkismo.net/article/27623) par Gio (CGA), le 27/11/2014.
Ce qui suit est le compte-rendu de ma visite au Kurdistan du Nord [NdT : Kurdistan en Turquie] entre le 2 et le 8 novembre, au sein de la délégation d’Angleterre organisée par Peace in Kurdistan Campain, le Parti Démocratique du Peuple (HDP) et le Congrès de la Société Démocratique (DTK).
La révolution sociale se propagera tôt ou tard au Kurdistan turc
Ce qui suit est le compte-rendu de ma visite au Kurdistan du Nord [NdT : Kurdistan en Turquie] entre le 2 et le 8 novembre, au sein de la délégation d’Angleterre organisée par Peace in Kurdistan Campain, le Parti Démocratique du Peuple (HDP) et le Congrès de la Société Démocratique (DTK).
Tout au long de cette visite, nous avons eu la chance de rencontrer de nombreuses organisations, y compris des partis politiques, des syndicats locaux et régionaux, les co-maires [NdT : maires adjoints ?] de Diyarbakir et de Suruç, la Coordination de l’Aide Humanitaire aux RéfugiéEs, les représentantes du Mouvement Démocratique Libre des Femmes, l’Association pour les Droits de l’Homme, les représentantEs du Parti des Régions, l’Association du Barreau de Diyarbakir, la Fédération des Familles de DétenuEs et nous avons visité les camps de réfugiéEs et les villages frontaliers proches de Kobanê.
Au cours de ces rencontres, nous avons eu la liberté totale de demander les questions que nous jugions pertinentes à propos de la situation, de leurs responsabilités, de leur façon d’approcher les problèmes qu’ils et elles doivent affronter et à propos de leurs tâches présentes et futures.
Il ne fait aucun doute que chacune des organisations évoquées ci-dessus sont surchargées de travail, à cours de fonds, sans soutien aucun du gouvernement central et doivent assurer l’aide humanitaire nécessaire actuellement. Cette situation est la conséquence des raisons suivantes :
a. La guerre à Kobanê a créé un gros problème dans la région dû à l’impressionnant nombre de réfugiéEs qui affluent, qu’il s’agisse des habitantEs de Kobanê ou des YézidiEsde Shangal (la province du Sinjar). Ce problème est partagé par chacun des groupes et départements évoqués plus tôt.
b. La lenteur du processus de paix entre le PKK et le gouvernement turc, qui est presque arrêté. Cette situation rend bien évidemment les gens énervéEs, frustréEs et les déçoient.
c. La guerre qui continue à Kobanê a fait encore plus de morts et de personnes déplacées, alors qu’il n’y a aucun signe univoque qui indiquerait clairement la défaite de l’EI. Il est désormais prouvé que le gouvernement turc supporte l’EI. Il y a bien des raisons pour manifester, protester et la répression vicieuse de la police aggrave encore plus la situation.
L’observation principale de notre visite est la fragmentation des organisations et la formation récente d’un grande variétés de groupes dans des endroits différents. Si une petite partie des groupes était ancienne, la plupart se sont développés durant les dernières années. Chacun travaille pour faire avancer la société vers la stabilité, la paix, la liberté, la justice sociale et les droits de l’homme.Il y a entre eux quelques signes de coordination.
La plupart de ces groupes se sont formées sur un manque et ont émergés seuls, en dépit de la situation et des volontés du gouvernement central. C’est l’une des raisons pour lesquelles on peut observer des tensions entre eux et le gouvernement. C’est étonnant de remarquer que, alors que la municipalité de Diyarbakir est élue par le peuple kurde, elle n’a aucun contact ni avec le chef de la police ni avec le gouverneur de Diyarbakir. C’est également le cas pour d’autres organisations. Par exemple, quand nous avons demandé à l’Association des Droits de l’Homme s’ils/elles avaient écrit à la police au sujet de leur comportement et des harcèlements qu’elle menait contre la population locale, ils/elles ont répondu qu « il n’y a aucune raison de leur écrire puisqu’ils ne nous répondent jamais ». Il y a de nombreuses écoles kurdes mais l’Etat ne les reconnait pas. Malgré cela, les gens les soutiennent ardemment et sont confiant qu’un jour elles/ils parviendront à forcer l’Etat à les reconnaitre. C’est cela qui est intéressant : les gens défient le pouvoir et l’Etat. Il y a un pouvoir à l’intérieur même des zones d’influence du pouvoir. Il y a un « pouvoir populaire » auquel les gens croient, qu’ils ont construit en dépit du pouvoir effectif de l’Etat, un « pouvoir populaire » auquel ils/elles travaillent et qu’ils ont rendu viable et puissant. C’est la manière qu’elles/ils ont de se ré-approprier le pouvoir accaparé par la minorité, par l’élite. Cependant, il faut noter que ce n’est pas si difficile alors que l’écrasante majorité de la population de ces villes est kurde et croient en ces changements. Voilà comment la révolution sociale part de la base de la société, et non de son sommet.
Après 28 ans de guerre, le PKK a réalisé qu’il fallait modifier l’orientation de leurs luttes, leurs objectifs et leur stratégie. Dans le contraire, leur futur n’aurait pas été meilleur que celui d’autres mouvements similaires.
A mon sens, le PKK, ou du moins la faction ou le groupe dominant au sein du PKK, a pris la bonne décision et la bonne direction en faisant taire les armes et en ouvrant leurs esprits, en passant de la force militaire au pouvoir populaire et de la révolution politique à la révolution sociale. La vague de la révolution sociale est si forte qu’il sera extrêmement difficile pour une personne ou un parti politique qui le souhaiterait d’en changer la direction… Et je ne parle pas de l’arrêter. C’est devenu un trait culturel, une coûtume. Particulièrement pour la jeune génération. Elles/Ils ont réalisé que c’était là la seule façon de défier le pouvoir, de remettre en cause le système et d’aboutir à des changements majeurs.
Les discussions que nous avons eu avec les gens sont univoques : tout le monde est très confiant dans la capacité de changement qui est entre leurs mains. Lors de notre rencontre avec le Mouvement Démocratique Libre des Femmes, il y avait 9 femmes présentes. Elles nous ont raconté comment elles traitaient les problèmes des femmes dans la société, tels que les violences conjugales, le viol et autres agressions sexuelles, comment elles soutiennent les personnes de toutes les manières possibles pour leur donner force et confiance pour affronter leurs propres problèmes. Quelques-unes parlaient de leur propre expérience et expliquaient que depuis qu’elles avaient rejoint le mouvement, elles avaient profondément changé, au point d’être presque une autre personne. Elles prennent part au camp de femmes pour la paix, partagent des missions, discutent de livres qu’elles lisent et travaillent avec la fédération démocratique des femmes de Kobanê. Quand nous leur avons demandé s’il y avait un groupe LGBT à Diyarbakir, elles nous ont répondu : « il y a quelques groupes dans la ville, nous sommes en contact et nous les soutenons ». C’est impressionnant de voir dans une ville comme Diyarbakir qu’il y a un mouvement de femmes composée de personnes tellement courageuses, à l’esprit tellement ouverts et qui construisent réellement la solidarité.
La Fédération des Familles de DétenuEs (Tuhad-FED) est un autre groupe avec lequel nous avons pu passer quelques heures pour discuter. Ce groupe a été formé en 1996 au nez et à la barbe du gouvernement. Il y a 14 bénévoles, dont la moitié sont des femmes qui travaillent sans relâche. La plupart des membres fondateurs et fondatrices du groupe ont une expérience très amère de la vie en prison, où elles/ils ont été torturéEs ou enferméEs sur de longues périodes. Le/La co-président-e est encore actuellement en prison. Cette fédération est très active et a des contacts réguliers avec les familles et les parents des détenuEs. Elles/Ils les soutiennent en gardant le contact, en leur trouvant unE avocatE et en finançant les visites des familles pauvres pour aller voir leurs proches en prison.
Ce groupe est en contact avec les différents groupes à l’étranger et localement avec l’Association des Droits de l’Homme (IHD). Durant notre meeting avec l’IHD, elles/ils nous ont confirmé que la police avait arrêté beaucoup de gens dans les manifestations du 6 et du 7 octobre 2014 contre l’autorité turque. C’est à ce moment-là que plusieurs milliers de personnes sont parvenuEs à s’échapper de Kobanê vers la Turquie, contre la volonté du gouvernement. Les manifestantEs protestaient alors contre la politique souterraine de soutien à l’EI menée par l’Etat turc. Le/La président-e de l’IHD nous a expliqué que juste 5 minutes avaient notre arrivée, un couple était venu au bureau pour les informer que leurs deux fils, agés de 16 et 17 ans, avaient été enlevé par la police. D’après leurs informations, 42 civils et 2 officiers de police sont morts, quelques 1 128 personnes ont été arrêtées dont 53 enfants. 221 personnes sont encore en prison.
Lors d’une réunion avec la co-présidente de l’un des syndicats qui sont actifs à l’hôpital, elle a confirmé l’arrivé de 128 blesséEs et de quelques personnnes gravement malades à l’hôpital. La police a mené une opération contre les bureaux du syndicat et à l’hôpital pour débusquer toute personne qui aurait été soigné à l’hôpital et qui serait susceptible d’aider les gens à Kobanê. Lorsqu’ils ont découvert la présence de malades et de blesséEs en provenance de Kobanê, ils ont harcelé la présidente du syndicat et d’autres infirmières, les insultant et confisquant leurs papiers d’identité.
Lors de notre réunion avec l’Association du Barreau de Diyarbakir, nous avons rencontré 5 avocatEs. Ils/Elles nous ont dit qu’environ un millier d’avocatEs travaillent avec elles et eux dans la région du Kurdistan sur différents sujets, pour les droits des enfants et des femmes ou dans les centres d’aide légale mis en place par l’Etat. Elles/Ils confirment que le processus de paix n’a pour l’instant apporté aucun changement majeur. Ils/Elles étaient optimistes et considéraient que la situation devrait s’améliorer dans l’année à venir, étant donné que la constitution doit changer. Elles/Ils ont fait remarquer qu’un système de libération sous caution existe mais ne s’applique pas aux personnes qui ont été engagées dans des actes politiques. Celles-ci doivent impérativement être jugéEs par un tribunal. Quand nous leur avons posé des questions à propos d’éventuelles plaintes à faire au sujet du comportement de la police, elles/ils nous ont répondu : « Nous ne pensons que cela vaille la peine de se plaindre. La police n’écoute pas ces doléances et ne changera pas son attitude ».
Ils/Elles ont confirmé que 200 étudiantEs ont été arrêtéEs et que, dans toute la Turquie, quelques 3 à 4000 personnes sont encore en prison. Et ceci en dépit de la constitution qui stipule que personne ne devrait être arrêtéE pour ses activités ou opinions politiques. Cependant, si quelqu’unE appartient à certains groupements politiques ou est arrêtéE en possession d’un drapeau ou d’une pancarte avec des slogans incitant à la haine, il/elle est susceptible d’être arrêtéE.
La détresse des réfugiéEs continue
Depuis la prise de Mossoul, en Irak, par l’Etat Islamique, le génocide des Yézidis et le début de la guerre à Kobanê, la région du Kurdistan en Turquie est submergée de réfugiéEs de Kobanê et de Sinjar. Plus de 100 000 YézidiEs ont fui, beaucoup d’entre elles et eux arrivant au Kurdistan irakien et quelques 18 000 en Turquie. Environ 4 000 d’entre elles et eux sont dans l’un des camps qui bordent la ville de Diyarbakir. Le co-maire de Diyarbakir nous a confirmé qu’aucune aide n’était parvenue des Nations Unies. Les gens de la région se sont collectéEs pour fournir tentes, nourriture et vêtements. Il dit : « 90% des dons et de l’aide fournis aux municipalités de Diyarbakir provient de la population locale et seulement 10% de l’Etat ». Ils nous a expliqué qu’ils/elles travaillent très dur pour satisfaire les besoins vitaux, tels que les tentes, la nourriture, les vêtements, l’eau chaude, l’électricité, l’accès à des douches et des sanitaires, un contrôle médical et des écoles pour les enfants. Il note qu’ils/elles font face à de grosses difficultés puisque tous les services sont assurés par des volontaires. Il n’y a pas assez de monde. Ils/Elles manquent également de personnes qualifiées, de médecins, de lits, d’ambulance, de médicaments. Le gouvernement turc ne les soutient pas pour assurer ces services et tout a été organisé par les municipalités.
Nous avons également rencontré le Syndicat de l’Anatolie du Sud-Est au sein duquel Gabb est en charge de la coordination de l’aide humanitaire pour les réfugiéEs. Ce groupe réunit 286 membres dont 30% sont des femmes. Ils/Elles élisent 7 personnes qui font partie du comité actif [NdT. active committee, que l’on peut probablement traduire par comité exécutif]. La moitié de leur budget provient des municipalités de la région et ils/elles ont des contacts à l’étranger. Gabb nous a dit qu’elles/ils avaient un programme intensif pour les 3 prochains mois : coordination des camps de réfugiéEs, coordination entre les réfugiéEs de Kobanê et celles et ceux de Shangal mais également travail auprès de la Turquie pour obtenir un soutien humanitaire et des informations. Elles/Ils ont aussi pour objectif de répertorier les personnes dans les camps selon leur genre, leur âge, leur état de santé et d’autres problèmes. Ils/Elles ont confirmé que 9 camps de réfugiéEs sont sous leur supervision, dont 4 sont ceux des YézidiEs de Shangal. Selon leurs dires, environ 6 000 d’entre celles et ceux-ci seraient déjà retournéEs au Kurdistan irakien mais que 96 000 autres sont arrivéEs à Suruç et 2 840 à Mardin.
Nous avons aussi visité le camp de YézidiEs où plus de 4 000 personnes vivent. Les gens s’y plaignent de la qualité de la nourriture, réclament l’eau chaude, des médecins et des infirmièrEs. Ils/Elles nous ont dit qu’à cause du manque de moyens de locomotions, cela prenait 15 jours pour être transféréE vers un hôpital et que les réfugiéEs démuniEs devaient payer pour leur traitement.
A Suruç, nous avons visité le camp de réfugiéEs de Kobanê qui a été installé le 15 septembre 2014. Elles/Ils ont les mêmes équipements que les réfugiéEs de Shangak. Il semble qu’ils/elles vivent dans des conditions raisonnables. On nous a dit qu’il y avait 15 médecins, 20 infirmièrEs et beaucoup d’autres qui les suivaient. Ils/Elles paraissaient plus heureux que les réfugiéEs de Shangal, probablement en raison de plusieurs facteurs :
a. Ils/Elles sont très proches de Kobanê, d’où elles/ils viennent, alors que les YézidiEs sont très loin de Shangal
b. Les réfugiéEs de Kobanê ont le sentiment que le séjour est temporaire et qu’ils/elles retourneront bientôt chez elles et eux. Les gens de Shangal n’ont que peu d’espoir de retour tant que l’EI contrôle leur région.
c. Les réfugiéEs de Kobanê ont eu du temps pour partir de chez elles et eux et certainEs ont pu prendre leurs objets de valeur avec elles et eux. Les YézidiEs, de l’autre côté, ont subi un massacre soudain et ont tout laissé derrière elles et eux. Beaucoup de leurs proches ont été tuéEs, des centaines de femmes ont été kidnappées par l’EI et vendues comme esclaves sexuelles. Leur sort est encore inconnu.
d. Les réfugiéEs de Kobanê sont partiEs alors qu’il y avait encore des gens qui se battaient (et se battent encore) contre l’EI. Les YézidiEs sont amerEs envers les forces de Barzani (les peshmergas) : ils nous ont dit que les Peshmergas se sont retirés dès que l’EI a attaqué et qu’ils les ont laissé se faire massacrer. Le retrait des Peshmergas restent un mystère et personne n’est en mesure d’expliquer si c’est un ordre de Barzani, un accord avec l’EI, le gouvernement turc et Barzani ou quelque chose d’autre. Quand nous en avons parlé aux gens dans le camp des YézidiEs, certainEs ne cachaient pas leur colère et leur frustration contre les Peshmergas de Barzani.
Le gouvernement turc a changé de tactique mais pas de stratégie contre le peuple kurde
Ce qui revient dans toutes les bouches sur place c’est : « Il n’y a eu aucun changement majeur depuis le cessez-le-feu de décembre 2012 ». La suppression [NdT !? The suppression en anglais… pas compris] et l’oppression continuent, la communauté kurde est encore marginalisée et on peut toujours voir des différences majeures entre les villes turques et les villes kurdes.
Il n’y a pas beaucoup de soutien de la part du gouverneur local ou du gouvernement central aux municipalités qui sont controllées par le peuple kurde. La communauté kurde souffre largement du chômage et des problèmes sanitaires. Les gens vivent encore dans la crainte, pour leur propre sécurité et pour celles de leurs enfants, qui risquent d’être harceléEs, kidnappéEs ou arrêtéEs sans raison.
Il est vrai que le peuple kurde a désormais le contrôle des municipalités et met sur pied de nombreux associations, organisations, groupes et syndicats. Cependant, ils/elles ne reçoivent pas ou très peu d’aide du gouvernement. Il est important de noter que les kurdes ont forcé le destin : le gouvernement turc n’a pas d’autre choix que de faire avec elles et eux. Cette situation est peut-être en partie dûe au fait que le gouvernement espère devenir un membre de l’Union Européenne. Aussi les kurdes en ont profité et se sont émancipéEs de la situation dans laquelle ils/elles étaient contraintEs jusque là. Elles/Ils se préparent à se défendre et à défendre ce qu’elles/ils ont acquis. Il n’est pas question d’arrêter là leur révolution sociale, alors qu’elle ne fait que commencer.
Des choses peuvent arriver mais il faut veiller à ce qu’elles ne fassent pas dérailler la révolution sociale
La situation est très tendue et délicate. Le processus de paix semble avoir fait son temps. Kobanê est encore enserrée, l’EI est toujours une grave menace pour la region et il semble que déboulonner Assad du pouvoir ne fait pas partie des possibilités du moment. Les Etats-Unis et le reste des pays occidentaux ne parviennent pas à établir une politique ou une stratégie claire, à même de vaincre l’EI. Et le gouvernement turc n’est pas sérieux quand il prétend négocier avec le PKK. Tous ces facteurs ont des impacts directs et indirects sur la situation en Turquie.
Cela étant, d’autres facteurs encore plus importants pourraient faire dérailler la révolution sociale :
a. La fin du cessez-le-feu unilatéral par le PKK et le retour à la guerre asymétrique (la guérilla). Ce sera un désastre tant pour la société turque que pour la communauté kurde. Sans aucun doute, cela amènera des morts en plus, de la destruction, des déplacements de populations, attisera les haines entre turcQUEs et kurdes, augmentera la vague de racisme et aura un impact négatif sur l’ensemble de la région, en Irak, en Iran, en Syrie et sur le territoire kurde tout particulièrement.
b. L’attitude des USA et des pays occidentaux, qui traitent le PKK comme une organisation terroriste, n’aide pas dans cette situation. Une telle politique n’apporte rien de bien au peuple kurde et à ses alliés dans la région. Ces pays doivent changer leur attitude à l’égard du PKK, ils doivent comprendre que ce n’est pas la même organisation que celle qu’elle était dans les années 90. Ils devraient considérer le PKK comme la force principale dans la région, et dotée d’une forte popularité. L’organisation a effectivement changé et progressé au cours de ces dernières années. Dans ces conditions, le PKK ne saurait être marginalisé. Les USA et les pays occidentaux devraient forcer le gouvernement turc à ne pas considérer le cessez-le-feu comme quelque chose d’acquis, ils devraient tous se saisir de cette opportunité historique de résoudre ce trop long conflit.
c. Le gouvernement turc entretient avec l’EI et les autres organisations terroristes de la région des relations douteuses. Par exemple, il les utilise dans une guerre par procuration qui pourrait à terme s’avérer très nuisible pour la Turquie elle-même. Le président de la Turquie, Mr Tayyip Erdoğan, et son gouvernement feraient bien d’abandonner leur rêve d’établir un nouvel Empire Ottoman au XXIème siècle pour se concentrer davantage sur les problèmes internes au pays et en particulier sur la question kurde.
d. Il y a une lutte féroce en Turquie entre les généraux de l’armée et les politiciens au sujet du pouvoir. Le processus de paix n’a jamais été dans l’intérêt des généraux de l’armée. Bien que la lutte soit moins patente ces temps-ci, l’intervention dans la région des vieux raisons d’espions, aux côtés des USA et des autres pays occidentaux, pourrait raviver ces tensions et renforcer les généraux, qui pourraient être tentés de refaire un coup d’état [comme cela a déjà été le cas plusieurs fois il y a quelques dizaines d’années, NdT]. Ce n’est évidemment pas dans l’intérêt du processus de paix et de la révolution sociale puisque cela ramènerait les vieillles politiques martiales de terreur, d’oppression et de massacres d’innocentEs. En résumé, le retour à la case départ.
Zaher Baher
Haringey Solidarity Group et Forum Anarchiste Kurde